Hélène de Troie

Hélène de Sparte est connue dans l’histoire, à tort, sous le nom d’Hélène de Troie. Cette dénomination est due aux allégations d’Homère qui avait besoin d’un prétexte, dans son récit de l’Iliade, pour justifier la guerre de Troie.

                

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Photo Michel Ledeuil : château de Cheverny : enlèvement d'Hélène

 

Une imposture

Hélène de Sparte est connue dans l’histoire, à tort, sous le nom d’Hélène de Troie. Cette dénomination est due aux allégations d’Homère qui avait besoin d’un prétexte, dans son récit de l’Iliade, pour justifier la guerre de Troie.

En effet, l'enlèvement de la reine de Sparte par Pâris lors d'une réception dans le palais d'Hélène est tellement extravageant que certains tragédiens grecs comme Euripide ont dénoncé cette hypothèse.

Le contexte historique

En 1250 avant J.-C., les Achéens sont à leur apogée. Atrée puis son fils aîné, Agamemnon, règnent sur un vaste réseau de cités grecques, à partir de leur capitale, Mycènes. Ils vivent en bonne intelligence avec les autres puissances grecques de l’époque.

Depuis l’anéantissement de la civilisation minoenne provoqué par l’explosion du volcan de Santorin vers 1540 avant J.-C., les Grecs ont dépouillé toutes les Cyclades et conquis la Crête, Chypre et même, si on en croit les textes anciens, une partie du delta du Nil.

Après la destruction de la Mysie, la patrie d’Andromaque, une seule puissance résiste encore. Il s’agit de la Phrygie dont la capitale est Troie. Ce royaume contrôle les Dardanelles et le Bosphore et le trafic maritime qui se fait entre la mer Noire et la mer Egée.

Une fois par an, les fêtes en l’honneur d’Aphrodite se déroulent dans l’île de Chypre. C’est l’occasion pour les Princes de l’époque de se retrouver et de participer à de véritables orgies. Hélène, reine de Sparte, qui a épousé Ménélas, le frère cadet d’Agamemnon, s’y rend pour se distraire, après avoir mis au monde sa fille unique Hermione.

C’est là qu’elle fait la connaissance de Pâris, le fils de Priam et convole une nuit avec lui. Lors des fêtes aphrodisiaques, tout est permis et elle n’y voit donc aucun mal à cela.

 

Le stratagème de Tyndare

Tyndare, roi de Sparte, n’avait eu de sa femme Léda que deux filles : Hélène et Clytemnestre. Craignant pour son royaume, il fit jurer à chacun des Prétendants que ceux-ci s’engageaient à venir au secours du futur mari d’Hélène, si quelqu’un venait à la lui enlever ou si le royaume de Sparte était menacé.

Bien entendu, Tyndare choisit le plus puissant d’entre eux : Ménélas, le frère cadet d’Agamemnon et offrit la main de la sœur cadette d’Hélène au roi de Mycènes. Ce double mariage assurait la sécurité du royaume de Sparte.

 

L’odieux complot

Antiloque, le fils aîné de Nestor, présent aux fêtes aphrodisiaques, rapporta à Ménélas les fredaines supposées de sa tendre épouse. Furieux et jaloux, ce dernier vint se plaindre à son frère.

Agamemnon profita de l’aubaine pour rappeler à tous les anciens prétendants leur serment de venir au secours de Sparte qui était offensé. Il envoya également une délégation auprès du roi Priam pour demander réparation.

 

Une histoire rocambolesque

Hélène apparaît dans la littérature comme une femme écervelée, séduite par un prince de passage qui l’aurait enlevée, nue, dans une barque, après l’avoir séduite lors d’une réception dans le palais de Sparte.

Hélène serait donc une princesse volage et infidèle, qui n’hésite pas à trahir son père, son peuple et son mari en quittant, en pleine nuit, le palais royal pour convoler avec le premier venu, fut-il prince et fils de Priam, le puissant roi de Phrygie.

 

Elle aurait embarqué dans le port de Gytheion, qui est distant de plus de quarante kilomètres de la capitale du royaume de Laconie, ce qui suppose une logistique importante pour fuir durant quatre longues heures sans qu’une sentinelle déclenche l’alarme.

 

        

V14-ITG 1030B Volterra musée étrusque enlévement dHélène

Photo Michel ledeuil : musée étrusque de Volterra : enlévement d'Hélène

Hélène n’est jamais venue à Troie

Hélène, après une grossesse difficile, vient d’accoucher d’Hermione. Encore une fille, se dit-elle. Quelle déception pour elle qui a supplié les Dieux de lui envoyer un garçon fort et vigoureux. Le royaume de Sparte sera à nouveau objet de convoitise et elle devra soit avoir un autre enfant, soit rechercher pour sa fille un prétendant qui saura, plus tard, la protéger des ambitions des autres royaumes grecs.

 

Elle a voulu se divertir et est partie pour Chypre. Elle est belle et elle veut retrouver, dans le regard des hommes, le désir que Ménélas ne semble plus éprouver pour elle.

Après s’être distraite, avec ce brin de folie qui fait partie de son charme, elle est partie de Chypre pour se rendre sur la terre de ses ancêtres, les Danéens, qui se sont installés, un siècle plus tôt, dans le delta du Nil. C’est ce que confirme Euripide dans la célèbre pièce de théâtre qui lui est consacrée.

« Ce beau fleuve est le Nil aux eaux pures, le ciel ne donnant pas de pluies à la terre d’Egypte, c’est lui qui arrose les champs quand fond la neige blanche,….. »  

Elle reste un moment à la cour d’un de ces grands-oncles, le roi Protée. Tombée malade en remontant le Nil, elle dût s’aliter. Protée mourut lors d’une épidémie de peste et le nouveau roi, Théoclymène lui offrit de rester quelque temps dans son palais. Euripide prétend même qu’il proposa à Hélène le mariage, ce qui est invraisemblable, puisqu'elle est mariée avec Ménélas.

 

Hélène de retour à Sparte

Lorsqu'Hélène, quelques années plus tard, revint dans sa belle capitale elle découvrit enfin l’odieux complot et la médisance dont elle fût l’objet.

Sans doute aurait-elle dû se précipiter jusqu’en Phrygie pour démontrer l’imposture, mais elle ne l’a pas fait.

Sa mère, Léda, n’a pas supporté les calomnies et s’est pendue. Tyndare, son père est mort lui aussi. Elle doit gérer le royaume. Elle doit élever sa fille Hermione. Dégoûtée des hommes qui se sont servis d’elle pour déclarer la guerre à la Phrygie, elle tombe en pleine déprime et ne sort plus de son palais.

 

Le retour de Ménélas

Huit longues années plus tard, Ménélas est de retour à Sparte. Victorieux mais penaud. Comment expliquer à sa femme que les Achéens se sont servis d’elle comme prétexte, pour mener une guerre aussi longue et meurtrière.

Pourtant, à la différence de Clytemnestre, sa sœur cadette, qui fera assassiner son mari Agamemnon à son retour de guerre, Hélène pardonne, sans doute par raison. Elle est reine. Elle a besoin du bras de Ménélas, bien que vieillissant, pour diriger ses armées. Chacun reprend son rôle.  

 

La rencontre d’Hélène et de Télémaque

Dans le chant IV de l’Odyssée, Homère nous apporte la preuve de la bonne intelligence qui règne entre les deux époux.

Hermione a épousé Néoptolème, le fils d’Achille qui vit en Epire. La longue absence de Ménélas n’a pas permis à Hélène, épouse fidèle, d’avoir un autre enfant. Mais Ménélas a eu entre-temps une aventure avec une jeune esclave, fille d’Alector. Son fils Mégapenthès devient un prétendant sérieux, bien que bâtard, pour la succession au trône.

 

Lorsque le fils d’Ulysse, Télémaque, arrive au palais de Sparte, il est tout d’abord reçu par Ménélas qui va lui donner des nouvelles de son père. Hélène apparaît ensuite « sortant des parfums de sa chambre et de ses hauts lambris, la reine survenait : on eût dit Artémis à la quenouille d’or ».

Au cours des échanges avec le fils d’Ulysse, Ménélas intervient avec ces mots : « Je pense comme toi, ma femme,… » et tout le récit démontre l’harmonie qui règne entre les deux époux.  

 

Oreste devient roi de Sparte

Néoptolème a ramené comme esclave la veuve d’Hector, Andromaque. Il en tombe amoureux. Hermione, froissée, en appelle à sa mère qui demande à son neveu Oreste, le fils d’Agamemnon et de Clytemnestre et nouveau roi de Mycènes, d’intervenir pour faire entendre raison à Néoptolème.

Mais Oreste, soit par stupidité, soit par ambition, fait assassiner son hôte ainsi qu’Andromaque et le fils qu’ils ont eu ensemble. Il épouse Hermione et deviendra ainsi roi de Mycènes et de Sparte après la mort d’Hélène.


Quel âge a Hélène lors de la guerre de Troie

Rien n’est dit là-dessus mais nous pouvons prendre les hypothèses suivantes : Hélène est l’aînée des deux filles de Tyndare et Léda. Clytemnestre, sa cadette qui a épousé Agamemnon a eu plusieurs enfants du roi de Mycènes. L’aînée, Iphigénie est une jeune adolescence lorsqu’elle sera immolée à Aulis pour que les Dieux accordent aux Grecs les vents favorables.

On peut donc penser que Clytemnestre a trente ans et qu’Hélène en aurait donc trente-deux lorsque les Achéens mettent le siège devant Troie. Hermione doit alors avoir 2 ou 3 ans. 

Lors du retour de Ménélas, après la guerre qui a duré selon le mythe, dix ans, Hélène a donc un peu plus de quarante ans et ne peut plus enfanter. 

 

En conclusion

L’histoire de cette jeune et très belle princesse est venue jusqu’à nous, car elle a servi de prétexte à la déclaration de la guerre de Troie. On sait que depuis longtemps les Achéens cherchaient un motif pour envahir la Phrygie.

Sans doute n’a-t-elle pas mesuré le risque qu’elle prenait lors des fêtes d’Aphrodite, car, comme toutes les jolies femmes, elle pense que sa qualité de princesse autant que sa beauté la protège de la jalousie des uns et de la calomnie.

 

Sa vie lui a donc échappé. Elle a failli épouser Thésée à douze ans après que ce dernier fût devenu veuf de Phèdre. Elle a été par la suite l’objet d’un concours pour servir les intérêts de son père Tyndare. Elle fut, quelques années plus tard, non pas la cause mais une victime de la guerre de Troie.

Elle n’a pu avoir d’enfant mâle qui aurait pu lui succéder et a sombré dans une profonde déprime lorsqu’elle a vu sa seule enfant, Hermione, être méprisée par son mari.

 

Les hommes, Homère le premier, en a fait une femme fatale, volage, écervelée. Homère avait besoin de cette infamie pour justifier la guerre victorieuse mais non fondée des Achéens. Plus tard, de nombreux auteurs ou historiens de pacotille se sont emparés du mythe sans se poser aucune des questions qui sont abordées ci-dessus. Leurs fantasmes ont primé le bon sens.

 

Hélène dans le roman « l’Ombre de Polycaste »

Dans "l'Ombre de Polycaste", le personnage d’Hélène est abordé de nombreuses fois lors des échanges entre Hector et Sylvia Viscolli, dans le roman.

Ils évoquent la vie de la jeune reine dès leur première visite à Mycènes, puisque c’est à cet endroit qu’a été décidée la guerre de Troie :

« C’était à l’entrée du mégaron que Ménélas, le roi de Sparte, était venu se plaindre à son frère. Hélène avait disparu. On l’avait vu à Chypre, avec un freluquet lors des fêtes d’Aphrodite et il venait d’avoir la confirmation par Antiloque qu’il s’agissait bien de l’un des fils du roi Priam.....»

Tout au long du récit, le personnage d’Hélène au même titre que celui de sa sœur, Clytemnestre, d’Andromaque ou encore Cassandre prend corps et donne à cette jeune femme attachante, une réalité.

 

VG16-15180 Parme musée de la Pilotta  lenlèvement dHélène de Troie par Pâris

Photo Michel Ledeuil : tableau exposé dans le palais de la Pilotta à Mantoue

     

Ce superbe tableau baroque représente Hélène accueillie par Pâris dans la barque avec laquelle il va ramener jusqu'à Troie.
 
Hélène est très belle et correspond au modèle féminin de l'époque baroque.
Elle est blonde, sa coiffure est soignée, le sein dénudé avantageux et sa jambe est fine.

Les gestes des différents personnages sont stéréotypés, cependant le mouvement général de cet enlèvement est bien rendu.
On a l'impression qu'Hélène a un dernier geste de recul en prenant soudainement conscience de sa folie.
La barque est entourée de néréides, signe que Poséidon, le dieu des tempêtes, ne s'opposera pas à la folie d'Hélène et du fils de Priam.